Fruits d'automne...à l'autre bout du monde...
Octobre me met l'âme sans dessus dessous, l'automne est depuis longtemps ma saison préférée, le printemps le suit de prêt...mais le rouge a ma préférence sur le vert...
Octobre, c'est la fraîcheur des sous-bois qui fument à l'humidité des châtaigniers ...Octobre sent la terre qui garde en elle les dernières chaleurs avant l'hiver...Octobre c'est la première flambée facultative dans la cheminée...et Octobre c'est
"L'Odeur des Pommes"
"On entre dans la cave. Tout de suite, c'est ça qui vous prend. Les pommes sont là, disposées sur les claies - des cageots renversés. On n'y pensait pas. On n'avait aucune envie de se laisser submerger par un tel vague à l'âme. Mais rien à faire. L'odeur des pommes est une déferlante. Comment avait-on pu se passer si longtemps de cette enfance âcre et sucrée?
Les fruits ratatinés doivent être délicieux, de cette fausse sécheresse où la saveur confite semble s'être insinuée dans chaque ride. Mais on n'a pas envie de les manger . Surtout ne pas transformer en goût identifiable ce pouvoir flottant de l'odeur. Dire que ça sent bon, que ça sent fort? Mais non. C'est au-delà...Une odeur intérieure, l'odeur d'un meilleur soi. Il y a l'automne de l'école enfermé là. A l'encre violette on griffe le papier de pleins, de déliés. La pluie bat les carreaux, la soirée sera longue...
Mais le parfum des pommes est plus que du passé. On pense à autrefois à cause de l'ampleur et de l'intensité, d'un souvenir de cave salpêtrée, de grenier sombre. Mais c'est à vivre là, à tenir là, debout. On a derrière soi les herbes hautes et la mouillures du verger. Devant, c'est comme un souffle chaud qui se donne dans l'ombre. L'odeur a pris tous les bruns, tous les rouges, avec un peu d'acides vert. L'odeur a distillé la douceur de la peau, son infime rugosité. Les lèvres sèches, on sait déjà que cette soif n'est pas à étancher. Rien ne se passerait à mordre une chaire blanche. Il faudrait devenir octobre, terre battue, voussure de la cave, pluie, attente. L'odeur des pommes est douloureuse. C'est celle d'une vie plus forte, d'une lenteur qu'on ne mérite plus."
(Philippe Delerm - "La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules")
Les érables du Québec se couvrent de rouge, les vinaigriers brandissent leurs grappes veloutées bordeaux , le chêne d'Amérique se marbre d'or et de pourpre...les écureuils font leur dernières réserves au nez des marmottes...et les étals nous offrent de curieux fruits: prunes bleues, canneberges, grenades, pommes évidemment et cerises de terre...
Si les prunes bleues sont bien nos quetsches et les pommes, des pommes, la grenade est sans surprise mais...
Les cerises de terre (que nous appelons "amour en cage") et les canneberges méritaient d'être goûtées...
Les premières sont surprenantes, elles ont un goût de melon, poire, miel, d'une douceur incroyable pour les papilles. Les secondes, crues sont inmangeables par leur amertume mais cuites avec suffisamment de sucre, elles offrent un goût unique qui pourrait rappeler (de très loin) la groseille.
Il y a quelques temps, Christelle, nous faisait partager une recette aux trois prunes de Lorraine...j'ai tenté une tarte aux trois fruits d'automne de l'autre bout du monde:
Blanchir une abaisse de pâte brisée
Y disposer des prunes bleues coupée en deux
Recouvrir de canneberges cuites
Parsemer de cerises de terre
cuire 20 minutes au four à 180°C (350°F)
SE REGALER...! C'est ce que j'ai fait..."Octobre tient sa revanche"....